Le pétrole étant une ressource finie non-renouvelable à l’échelle de temps de l’Humanité, son exploitation passera par un maximum – souvent appelé pic de production – puis entamera une longue descente éventuellement ponctuée de rebonds, pendant laquelle la société sortira peu à peu du pétrole. Enfin, l’exploitation s’arrêtera ou atteindra un niveau marginal qui fera du pétrole une curiosité et non le produit de masse qu’on connait aujourd’hui (4 litres par jour pour un européen).
Jusqu’à présent, nous avons connu la phase de croissance de l’exploitation industrielle du pétrole, et ce depuis le milieu du XIXème siècle. Pendant ces 150 ans, un pétrole généreux et bon marché s’est peu à peu diffusé dans tous les aspects de nos sociétés, structurant les modes de vie, les infrastructures et les économies. Etant donné ce rôle central du pétrole, prévoir et se préparer à la deuxième phase de l’exploitation industrielle du pétrole, c.-à-d. le régime de déclin, devrait être une priorité.
Le déclin trouve son origine dans des contraintes qui avec le temps pèsent de plus en plus sur la production. Ces contraintes résultent d’interactions entre des facteurs physiques caractéristiques de la ressource exploitée, des facteurs techniques, des facteurs économiques, des facteurs politiques, et autres (voir l’exemple de la Grande-Bretagne ou de la Norvège). L’importance relative de ces facteurs « sous-terre » et « en surface » alimente des débats houleux parce qu’ils varient d’une ressource à l’autre et que chaque personne tend à surpondérer dans son analyse le rôle des facteurs qu’il maîtrise le mieux (la géologie, l’économie, la géopolitique,…). A côté de ces contraintes, s’ajoute à présent la contrainte climatique. Certains estiment que cette contrainte politique dominera toutes les autres et sera le moteur du déclin de la production pétrolière via une baisse plus ou moins forcée de la demande.
Cependant, de nos jours les contraintes non-climatiques sont déjà suffisantes pour entraîner un effritement de la production du pétrole conventionnel, qui assure les trois quarts des approvisionnements en liquides pétroliers, et forcer à un recours à des pétroles plus difficiles et moins économiques comme les pétroles de roche-mère. Souvenons-nous ! Le plafonnement de la production de pétrole conventionnel a surpris le monde entier, les prix ont flambé, l’inquiétude pour les économies était grande. C’était en 2000-2008. Mais après la crise, grâce à des prix élevés du pétrole, une politique monétaire US accommodante et l’esprit pionnier américain, le pétrole de roche-mère US est arrivé. Il a fini par inonder les marchés et le prix du pétrole s’est effondré. Mais cette situation est temporaire. Le pétrole de roche-mère nous a offert jusqu’à présent une bonne dizaine d’années de répit, et nous avons oublié la leçon donnée par le plafonnement de la production de pétrole conventionnel….
Figure 1: Evolution de la production de brut conventionnel (image du haut), et du prix du pétrole (image du bas). Observation (noir) et projections effectuées par l’Agence Internationale de l’Energie dans ses rapports annuels World Energy Outlook (weo) publiés à différentes époques (couleurs).